Les hommes gais et bisexuels sont quatre fois plus susceptibles de tenter de se suicider comparativement aux hommes hétérosexuels.1 Le suicide est évitable, mais si nous voulons rejoindre les hommes à risque, nous devons être en mesure de les trouver.
Dans la population générale (principalement hétérosexuelle), les fournisseurs de soins primaires – dont les médecins de famille – sont des intervenants clés susceptibles de pouvoir identifier les individus à risque de se suicider.2 Cependant, les hommes gais et bisexuels ont des tendances distinctes en matière d’accès aux soins de santé3 et ils sont nombreux à ne pas aborder des enjeux sensibles ou des sources de stigmatisation – dont le suicide – par crainte de susciter des réactions négatives en lien à leur sexualité.4
Dans ce contexte, nous avons utilisé des données de l’édition 2014-15 du sondage Sexe au présent afin de mesurer l’engagement en matière de soins de santé chez les hommes gais et bisexuels canadiens en lien à des idées suicidaires ou des tentatives de suicide récentes.
Résultats clés :
19 % des 7 872 hommes interrogés ont affirmé avoir eu des idées suicidaires ou fait une tentative de suicide au cours des 12 derniers mois.
Seuls 58 % de ces hommes avaient parlé à un prestataire de soins de santé de suicide ou d’inquiétudes liées à la santé mentale (c.-à-d. la dépression ou la consommation d’alcool ou de drogues).
Les groupes suivants étaient plus susceptibles d’avoir parlé à un prestataire de soins de santé :
- les hommes plus âgés;
- les hommes avec d’importants réseaux de soutien social;
- les hommes avec un médecin de famille; et
- les hommes qui parlent ouvertement de leur sexualité avec un prestataire de soins de santé.
Afin de mieux comprendre les façons dont nous pourrions rejoindre les hommes gais et bisexuels qui ont récemment eu des idées suicidaires et qui n’ont pas encore parlé à un prestataire de soins de santé de leurs besoins en santé mentale, nous avons calculé la proportion qui a eu recours à une multitude de ressources cliniques et communautaires différentes, notamment des médecins de famille, des cliniques sans rendez-vous, des professionnels de la santé mentale et des organismes communautaires gais. Nous avons également calculé le pourcentage de ceux qui avaient passé un test de dépistage du VIH au cours des 12 derniers mois et le pourcentage intéressé par la prophylaxie pré-exposition, ou PrEP5.
Nous avons constaté qu’il n’y a pas une seule manière de pouvoir rejoindre ces hommes à risque de se suicider (voir la figure ci-dessous. La figure en anglais seulement). Par exemple, 59 % d’entre eux ont un médecin de famille, 50 % se sont fait dépister pour le VIH au cours des 12 derniers mois et 16 % sont bénévoles pour un organisme communautaire gai. Cependant, nous avons trouvé encourageant de constater que 88 % d’entre eux ont eu recours à au moins une des ressources que nous avons examiné.
Qu’est-ce que cela veut dire?
Nous croyons que ces résultats constituent un bon argument en faveur de l’implémentation de coalitions ou de réseaux élargis de prestataires de soins cliniques et communautaires qui pourraient être en mesure de rejoindre les hommes gais et bisexuels à risque de se suicider. Ces réseaux devraient inclure des prestataires de soins primaires tels des médecins de famille et des cliniques sans rendez-vous, mais ces options ne sont pas suffisantes. Nous devons également collaborer avec les organismes communautaires LGBTQ2 et les cliniques de santé sexuelle (qui administrent des tests de VIH et la PrEP quotidiennement à un nombre important d’hommes gais et bisexuels) afin de renforcer leur capacité d’identifier les individus à risque de se suicider et de les aider à trouver des façons d’assurer la sécurité de nos communautés.
Que puis-je faire?
Si vous aimeriez en savoir plus sur la prévention du suicide au sein des communautés queer et trans, vous pouvez vous impliquer de plusieurs façons.
- La LGBTQ2 Mental Health Roundtable est un collectif vancouvérois de chercheurs et de prestataires de services qui se rencontrent à tous les trois mois afin d’identifier de nouvelles stratégies de prévention du suicide au sein de nos communautés. Le groupe est ouvert à toute personne ayant un intérêt pour le travail qu’il effectue. https://blogs.ubc.ca/ lgbtq2mentalhealthroundtable/ (en anglais seulement)
- La thématique du Sommet sur la santé des hommes gais de 2018 est la santé mentale et la consommation d’alcool ou de drogues. Si vous aimeriez y participer, vous pouvez vous inscrire et assister aux sessions qui vous intéressent : http://cbrc.net/summit
- Le Centre d' intervention en cas de crise et de prévention du suicide de la Colombie-Britannique propose des formations communautaires de prévention du suicide. La plupart d’entre elles sont ouvertes au public. Vous pouvez également organiser une formation pour votre organisme. https://crisiscentre.bc.ca/suicide-pip-initiative/ (en anglais seulement)
Si vous ou quelqu'un que vous connaissez pensez au suicide, des personnes sont présentes afin d’assurer votre sécurité. Composez le 1-866-APPELLE (277-3553) ou visitez https://suicideprevention.ca/Need-Help?locale=fr_ca afin de trouver un centre de crise 24 h près de vous.
Référence :
Cet article a été publié dans le American Journal of Orthopsychiatry (© APA 2018). Pour obtenir une copie du rapport complet, communiquez avec [email protected].
1 https://ajph.aphapublications.org/doi/10.2105/AJPH.2016.303088
2 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23738992
3 https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/82-003-x/2008001/article/10532-eng.htm
4 https://bmcfampract.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12875-015-0389-4